Un conflit avec un associé, un litige avec un fournisseur ou un différend avec un employé ? La procédure judiciaire est peut-être la solution qui s’impose à vous, mais il existe des modes alternatifs de résolution des conflits pacifiques, rapides et flexibles. En voici un aperçu.
Toute forme de collaboration entraîne tôt au tard l’apparition d’un conflit. Même en tant qu’entrepreneur, il peut arriver qu’un conflit naisse entre vous et votre associé, ou qu’il y ait contestation avec un fournisseur ou un sous-traitant.
Comment résoudre ces litiges ?
1. La négociation directe
La mise au point d’une solution collective créative qui respecte les intérêts et les prises de position de chacun mène souvent à des accords plus durables et réduit considérablement les chances de voir réapparaître un conflit. Mais après la naissance d’un conflit, rares sont les personnes capables d’adopter une attitude constructive. Les relations se sont envenimées, la confiance est rompue et la communication coupée. Les tentatives de résolution échouent la plupart du temps, ne donnant lieu qu’à des mots durs, un dialogue de sourds et une escalade du conflit.
2. La procédure judiciaire
Vous pouvez bien sûr contacter un avocat pour que votre litige soit tranché devant le tribunal. En fonction du type d’affaires et du retard que le tribunal a pris, cela peut durer plus d’un an avant que votre affaire ne soit enfin plaidée. Si l’une des parties fait appel, ce délai se transforme souvent en années. Par ailleurs, le coût est élevé et les procédures complexes.
Le juge se prononce en se fondant uniquement sur des considérations juridiques. Une partie gagne, l’autre perd. En tant que partie, vous ne participez pas à la prise de décision quant au contenu du jugement. Le « gagnant » a lui aussi souvent l’impression que justice ne lui a pas été rendue et la plupart du temps, il est impossible de continuer une relation avec le partenaire commercial qui a perdu la procédure.
3. La médiation
Depuis quelques années, la médiation retient de plus en plus l’attention des entrepreneurs qui la considèrent comme une alternative valable à la procédure judiciaire. Les échanges commerciaux actuels nécessitent d’ailleurs une résolution des conflits rapide et flexible.
Attention : Le terme « médiation » recouvre de nombreuses réalités et, de ce fait, est souvent utilisé à mauvais escient. Ainsi, à titre d’exemple, les médiateurs auprès d’entreprises (publiques), d’organismes professionnels ou d’hôpitaux, les médiateurs en matières pénale et fiscale ainsi que les médiateurs de dettes interviennent dans d’autres contextes que celui de la médiation réglée légalement et décrite ici.
Au sens du Code judiciaire, la médiation est un processus structuré, dans lequel deux ou plusieurs parties à un litige tentent elles-mêmes de résoudre leur litige, volontairement, avec l’aide d’un médiateur. Ce processus peut être engagé par les parties ou être suggéré ou ordonné par une juridiction. Les parties choisissent elles-mêmes le médiateur.
Dans une médiation, il appartient aux parties elles-mêmes de trouver une solution gagnant - gagnant, ce qui offre beaucoup plus de possibilités que lorsqu’un tiers tranche un litige. Autre avantage considérable : la loi impose le traitement confidentiel des données échangées, ce qui évite toute publicité négative.
La durée et le coût d’une médiation sont bien moins élevés que ceux d’une procédure judiciaire qui nécessite l’intervention d’avocats. Une médiation dure en moyenne 35 jours. Pour un procès classique, il faut compter environ 505 jours. Le coût moyen d’une médiation s’élève à 7 000 euros. Pour un procès classique, il s’élève à 16 000 euros environ. Bien que ces chiffres puissent être nuancés, ils n’en demeurent pas moins significatifs. Puisque cette procédure est rapide, il est par ailleurs inutile de constituer des provisions pendant des années.
À l’instar d’autres procédures judiciaires, la médiation peut aussi être couverte par votre assurance protection juridique.
Le plus grand avantage ne réside pas tant dans le fait que les frais du médiateur soient partagés, mais plutôt que la relation commerciale demeure intacte grâce à la recherche conjointe d’une solution. En effet, la poursuite de la collaboration professionnelle revêt souvent une importance essentielle pour les parties, ce que permet la médiation, car il n’y a ni perdant ni gagnant. Les ponts n’ont pas été coupés.
À l’inverse d’un accord atteint après des négociations directes, l’accord de médiation peut, s’il a été conclu grâce à un médiateur agréé par la commission fédérale de médiation, être facilement et rapidement homologué par le tribunal. Cette homologation lui confère les mêmes effets qu’un jugement et l’accord peut dès lors être exécuté immédiatement par un huissier de justice.
4. L'arbitrage
Si la médiation ne débouche pas sur un arrangement à l’amiable, les parties peuvent porter le litige devant un tribunal d’arbitrage.
L’arbitrage est une procédure extrajudiciaire privée qui se déroule dans les grandes lignes comme la procédure judiciaire. Les parties doivent désigner et rémunérer elles-mêmes leurs juges ou arbitres. À l’inverse des juges des tribunaux ordinaires, les arbitres ne sont pas des juges professionnels : il s’agit souvent d’avocats ou de juristes, ou encore de réviseurs d’entreprises, d’architectes, etc. Pour chaque procédure d’arbitrage, l’expertise et la connaissance spécifiques des experts potentiels sont analysées. Si plusieurs arbitres ont été désignés, ils forment un collège. La procédure se déroule normalement de manière confidentielle : les tiers n’ont pas accès à l’audition et le prononcé de la sentence n’est pas public. Il n’existe aucune obligation de notification aux autorités, ce qui peut être intéressant dans le cas d’affaires de concurrence.
Vous n’avez toutefois aucune prise sur le contenu de la décision. C’est l’arbitre ou le collège d’arbitres qui tranche.
La sentence doit être exécutée par les parties. Si l’une d’elles ne s’y plie pas, l’autre partie peut alors demander au Président du tribunal de première instance de contraindre son exécution.
La décision arbitrale ne permet pas d’interjeter appel.
L’arbitrage apporte beaucoup d’autres avantages indéniables : une réelle écoute des parties, la rapidité et la flexibilité de la procédure, l’expertise des arbitres et la confidentialité des débats et de la décision.
Bien que les parties doivent payer elles-mêmes les coûts de la procédure d’arbitrage, il reste néanmoins généralement moins cher si vous tenez compte du gain de temps et des frais et honoraires de votre avocat.
Il existe déjà différentes initiatives sectorielles spécifiques, comme la Commission de conciliation Construction et la Commission de litiges Voyages. Au niveau international, l’instance la plus connue est la Chambre de commerce internationale, mais il en existe beaucoup d’autres.
En pratique
Ce sont précisément les entrepreneurs qui ont tout avantage à déterminer anticipativement le mode de résolution de litiges qui leur convient le mieux. En région bruxelloise, de nombreux arbitres et médiateurs reconnus sont actifs et peuvent vous assister dans ce domaine. La liste des arbitres et médiateurs reconnus est disponible sur le site Internet du SPF Économie. Vous pouvez aussi utiliser le moteur de recherche de la Commission fédérale de médiation.
Sebastiaan Holslag, avocat
Katia Brouwers, 1819