Pourquoi passer en société ?
Les raisons de vouloir créer une société pour votre activité qui se développe sont multiples.
Il peut notamment s’agir des raisons suivantes, seules ou souvent cumulées : vos revenus sont en augmentation, vous souhaitez faire entrer des associés dans votre affaire, vous engagez du personnel, vous louez un bien, vous réalisez des investissements importants (véhicule, marchandises, immeuble…), vous contractez un crédit, etc. Vous trouverez un article détaillé sur le sujet sur notre site.
Nous abordons ici le cas le plus fréquent du passage en SRL. Pour la création d’autres sociétés que la SRL, dont les règles sont établies par le Code des sociétés et des associations (CSA), vous pourrez consulter les liens suivants : SA, SC, Société simple (SNC ou SComm).
Démarches pour la création de votre SRL
La première chose à faire est d’élaborer un plan financier étayé et de préférence validé par un expert-comptable, qu’il faudra ensuite présenter à un·e notaire pour la création de l’acte constitutif de la société. Le plan financier étayé sert principalement à démontrer que vous disposez d’un capital suffisant pour les activités projetées. Le·la notaire pourrait théoriquement refuser de créer la société si le projet semble sous-capitalisé dans le plan financier que vous avez préparé. Néanmoins, l’obligation des notaires quant à l’appréciation des plans financiers sont des obligations de moyens. Cela signifie que vous en restez responsables au final et que ce n’est pas leur responsabilité qui pourra être mise en cause en cas de problème à ce niveau-là. La responsabilité personnelle des fondateur·trice·s. peut par ailleurs être engagée en cas de faillite survenue dans les 3 ans si le juge estime que vous avez commis une faute de gestion ou sous-capitalisé votre projet ayant contribué à la faillite de votre entreprise.
Voici ce que le plan financier devra contenir :
- Un tableau de financement avec vos différentes sources de financement (incluant déjà les subsides et les prêts)
- Une description de votre activité
- Un bilan d’ouverture. Les fondateurs devront mentionner qu’ils déclarent avoir assez de fonds pour que la société puisse fonctionner
- Les bilans et comptes de résultats prévisionnels après 12 et 24 mois
- L’évaluation de votre budget sur 2 ans
- Un tableau d’investissements. S’il n’y a pas d’investissement à faire en société parce que tout a été déjà fait en personne physique, on peut faire évaluer ces investissements par un.e réviseur.euse d’entreprise pour les inclure
- Des hypothèses quant à l’évolution du chiffre d’affaire et de la rentabilité
Vous en saurez plus sur le plan financier en consultant cette page.
Ensuite, le·la notaire ira déposer au greffe du Tribunal de l’Entreprise (ou procéder par e-dépôt) un compte rendu de la réunion et un extrait des statuts. À partir de ce moment, votre société « existe ». Vous obtenez un numéro d'entreprise via la Banque-Carrefour des Entreprises et vous pouvez démarrer votre activité. Les statuts seront également publiés au Moniteur belge.
La SRL que vous créez va recevoir son propre numéro d’entreprise et aura un numéro de compte bancaire dédié, vous n’aurez donc plus besoin de votre numéro d’entreprise en tant que personne physique ni du compte bancaire professionnel que vous utilisiez auparavant. Il faut également avertir votre bureau de TVA ainsi que votre caisse d’assurances sociales que vous poursuivez votre activité en société.
Pour la constitution d’une société, vous n’avez pas toujours besoin d’un.e réviseur·eure d’entreprises. Ce sera nécessaire uniquement si vous vous apportez à la société d’autres biens que de l’argent : du matériel, un immeuble, un terrain, une camionnette ou autre apport en nature comme un fonds de commerce ou une marque, dont la valeur sera alors évaluée par le·la réviseur.euse qui sera chargé·e d’en établir la valeur. Si vous devez faire appel à un réviseur, pensez à inclure ce coût dans votre plan financier.
Votre statut
L’indépendant·e devient administrateur·trice de la société et est appelé·e comme tel·le. Cette appellation remplace celle de gérant·e depuis l’entrée en vigueur du nouveau CSA.
Les administrateurs·trices travaillent avec un statut d’indépendant·e·s mais sous le couvert du numéro d’entreprise de la société. Si vous êtes plusieurs, tous les actionnaires (anciennement appelé·e·s associé·e·s) travaillent avec le même numéro d’entreprise, celui de la société. Tous les administrateurs·trices sont considéré·e·s comme des dirigeant·e·s d’entreprise, et peuvent recevoir un revenu issu de leur travail au sein de l’entreprise.
Peut-on être salarié de sa société ? Non. Quand on est dirigeant d’entreprise, on doit obligatoirement être indépendant. Et ce, même dans le cas où les administrateurs·trices ont différentes tâches assignées.
Ce qui va changer quand vous passez en société
Vos avantages (à relativiser pour certains selon votre situation)
- Il y a désormais un patrimoine spécifique dédié à votre activité professionnelle, séparé de votre patrimoine privé. Donc vous n’êtes plus personnellement responsable des dettes de votre activité sauf en cas de faute de gestion ou si vous vous êtes rendu solidairement responsable, à titre personnel, de certains engagements (par exemple, un contrat de crédit que vous auriez co-signé avec votre société).
- La possibilité de moduler la manière de vous rémunérer
- Potentiellement moins d’impôts
- Plus de facilités si vous êtes plusieurs (pour la facturation, pour la visibilité envers les tiers, pour l’engagement de personnel)
Mais il faut également avoir en tête les points d’attention suivants :
- Il faut une activité à potentiel qui va générer des revenus
- La société doit verser un minimum de revenu au·à la dirigeant·e car l’objectif est de répartir la base imposable entre la société et le·la dirigeant·e. Le revenu peut être modéré, mais il en faut un qui justifie un minimum le train de vie du·de la dirigeant·e.
- Il faut de l’argent pour la création de la société (frais de notaire d’environ 1500 EUR, un montant de capital suffisant pour lancer votre activité, d’éventuels frais de réviseur, frais de comptable d’environ 500 EUR s’il est fait avec l’aide d’un.e comptable).
- Il faut un plan financier élaboré et qui a de préférence été fait avec un professionnel (même si ce dernier point n’est plus obligatoire)
- Gérer une société requiert une organisation spécifique et la gestion administrative et comptable d’une société est certainement plus lourde qu’en personne physique.
- l ne faut pas confondre les patrimoines privés et professionnels lors des entrées et sorties d’argent.
- Il faut bien connaitre le fonctionnement de la SRL
- La société devra payer la cotisation annuelle à charge des sociétés ainsi qu’une cotisations spéciale pour les pensions complémentaires pour dirigeant·e·s d’entreprise à l’Inasti.
Se rémunérer
Une grande partie de l’intérêt de constituer une société réside en la possibilité de rémunérer le·la dirigeant·e par d’autres moyens que le versement d’un salaire, fortement taxé, et de pouvoir répartir le bénéfice dans différentes catégories de revenus qui seront moins imposées.
Voici des explications sur le revenu d’indépendant mais également ces autres possibilités.
Revenu d’indépendant
Quand cela est possible financièrement, votre société peut vous verser un revenu (d’indépendant) et c’est ce revenu qui devra être déclaré dans la partie 2 de votre déclaration fiscale, rubrique « Revenus Dirigeants d’entreprise ». Sur Tax-Calc, il est possible de faire une simulation du revenu qui pourrait être versé. Ce revenu sera imposé selon les mêmes taux qu’en personne physique et servira aussi de base de calcul pour vos cotisations sociales.
Si vous êtes plusieurs, chaque administrateur·trice peut percevoir un revenu d’indépendant. Il faut préalablement discuter entre associé·e·s pour convenir des tâches et des revenus de chacun. Il est aussi possible de remplacer ou compléter un revenu par un autre avantage en nature (comme une voiture par exemple).
Il est possible de faire payer le précompte professionnel de votre revenu en avance par votre société, cela génèrera une charge déductible pour la société. Votre secrétariat social pourra calculer le précompte professionnel. Vous pouvez également demander au secrétariat social d’avoir des fiches de paie de dirigeant d’entreprise 281.20, ce qui peut être utile ou plus facile dès que vous aurez besoin de fournir une preuve de vos revenus (à une banque par exemple).
Distribution de dividendes
A la clôture des comptes au 31 décembre ou une autre date fixée pour la clôture, l’Assemblée générale décide si une partie du bénéfice qui se dégage sera ou non attribué en dividendes. Le montant de dividendes que vous pourriez recevoir dépend en principe de la proportion d’actions que vous disposez dans la société.
Avantages :
Pour les actionnaires, les dividendes sont des revenus nets, qui n’entrent pas dans le revenu qui sert de calcul pour les cotisations sociales et qui ne doivent pas être déclarés dans la déclaration d’impôts car ils ne sont pas soumis à l’impôt des personnes physiques (IPP).
Points d’attention :
- le bilan doit rester en positif et les fonds propres ne peuvent pas passer en négatif.
- la société paiera / doit prélever un précompte mobilier de 30 % avant de verser des dividendes
- Si vous ne vous payez qu’en dividende, vous ne paierez pas de cotisations sociales et ne cotiserez donc pas pour votre pension, car les dividendes ne sont pas des revenus imposables.
Vous trouverez ici un article étayé sur la distribution de dividendes.
Réserve de liquidation
La réserve de liquidation est un mécanisme qui se planifie et s’organise à l’avance. Il s’agit de créer une réserve dans votre bilan si la société a fait min. 50.000€ de bénéfice. Il s’agit d’une écriture comptable : l'argent est affecté dans un poste spécial au bilan appelé la « réserve de liquidation », et va rester bloqué pendant 3 ans. Après 3 ans, vous pouvez vous attribuer un dividende sur ces bénéfices passés et le précompte mobilier ne sera que de 15% au lieu des 30% pour les dividendes classiques.
Réduire le capital
Une autre manière de se rémunérer est la réduction de capital. Si votre société a été créée avant mai 2019, il peut être possible de récupérer de l’argent mis en capital. Si vous êtes plusieurs, vous devrez respecter la répartition prévue.
Pour les nouvelles sociétés, ce ne sera possible que si le capital de départ était conséquent et seulement après plusieurs années. Dans tous les cas, il faut que la structure de bilan reste positive malgré la réduction.
Cette opération requiert un acte notarié.
Le compte courant
En cas de difficulté temporaire (et pas structurelle) et après vous être fait conseillé, vous pourriez envisager que votre société vous prête temporairement de l’argent, à condition que vous le remboursiez ensuite.
Nous conseillons de rédiger au préalable une convention de prêt entre vous et votre société qui prévoit le montant et le délai de remboursement, ainsi qu’un taux d’intérêt. L’argent est indiqué comme une créance de la société envers vous à l’actif. A défaut de remboursement dans le délai prévu, l’argent pourrait être requalifié en revenu et soumis à l’impôt.
Revenus locatifs
Les personnes qui sont propriétaires en privé peuvent, à titre personnel, louer une partie de leur bien à leur société moyennant le paiement d’un loyer. Il faut calculer raisonnablement le revenu locatif que vous pouvez vous autoriser sans que cela ne pose de problème financier à la société. En cas de contrôle, l’administration fiscale pourrait requalifier une partie d’un loyer trop élevé en revenu professionnel.
A côté de ces options, vous pourrez aussi discuter avec un·e comptable de l’opportunité de pouvoir ou non mettre en place d’autres avantages en nature, des chèques repas, des droits d’auteur, ...selon votre situation.
Quid de la taxation?
Impôt des sociétés
La société est taxée à l’impôt des sociétés (Isoc) sur son bénéfice net, donc après le versement des revenus aux administrateur·trices. Contrairement à l’impôt des personnes physiques (IPP), les revenus engendrés sont taxés dès le premier euro perçu.
Le taux de l’Isoc est un taux unique fixé à 25 % (précédemment, il était à 33%).
Mais les PME peuvent bénéficier d’un taux réduit de 20% à certaines conditions.
D’abord, la société doit être considérée comme « petite société » et doit remplir au moins deux de ces conditions :
- Moins de 50 travailleurs (moyenne annuelle) ;
- Moins de 9.000.000€ de chiffre d’affaires annuel (HTVA) ;
- Moins de 4.500.000€ au total du bilan.
Ensuite, la rémunération annuelle du dirigeant d’entreprise doit être de minimum 45.000€ bruts si le résultat imposable de la société s’élève à min. 90 000€. Tous types de revenus touchés par le·la dirigeant·e sont pris en compte pour ce calcul. Si la société a un résultat moins élevé que le seul de 90.000€, elle peut verser au.à la dirigeant·e une rémunération annuelle moins élevée, mais ce montant doit être au moins égal au « résultat imposable », à savoir la base imposable qui est obtenue après application de la rémunération et des déductions fiscales (cotisations sociales, frais professionnels, etc).
Si les bénéfices de la société sont élevés, seule la première tranche de 100.000 EUR peut bénéficier du taux réduit. Ce qui dépasse sera imposé à 25%.
Il existe également certains taux spécifiques, comme celui de 33% pour certains revenus divers et certaines plus-values (Article 171,1° du CIR) ainsi que celui de 16,5% pour certaines plus-values sur des immobilisations corporelles ou financières, certaines indemnités, primes, subsides et rentes (Article 171,4° du CIR).
Entourez-vous d’un.e expert-comptable pour vérifier le·s taux qui vous sont applicables.
Impôt des personnes physiques
Ce sont les salaires et les tantièmes versés par la société aux dirigeant·e·s, considérés comme des revenus professionnels, qui sont imposés à l’impôt des personnes physiques (IPP) selon le principe du taux d’imposition progressive, par tranches.
Se verser un salaire, c’est donc déduire du bénéfice de la société (taxé à 25% (ISoc)) un montant qui sera taxé (pour partie) dans les tranches 25%, 40%, 45%, 50% (IPP).
Si la société augmente ou diminue votre revenu, vous paierez plus ou moins d’impôt (IPP).
Les frais nécessaires à l’activité professionnelle et au fonctionnement de la société peuvent être introduits comme tels dans la déclaration fiscale de la société sont considérés comme des frais professionnels de la société. En plus de cela, une déduction forfaitaire de frais pour le·la dirigeant·e d’entreprise sera appliquée automatiquement par l’Administration fiscale dans la déclaration fiscale du·de la dirigeant·e d’entreprise.
Consultez en tout cas un·e expert·e comptable pour savoir quels frais peuvent exactement être considérés comme des frais professionnels, dans quelle proportion les déduire, et savoir si vous devez ou non les amortir fiscalement sur plusieurs années. Pour plus d’information à ce sujet, vous pouvez également consulter notre article sur les frais déductibles.
Liens utiles :
- Réforme sur l’impôt des société (document du SPF Finances )
- Lien vers la dernière version coordonnée du Code de l’impôt sur les revenus de 2022 (édition 2023)
- Consultez également l’article suivant sur les incitants fiscaux pour les sociétés.
Fin de votre carrière, fin de votre société ?
Pour vous assurer un revenu suffisant quand vous ne travaillerez plus, prévoyez une épargne pension de votre côté et une PLCI par précaution, car la pension d’indépendant·e pourrait ne pas vous suffire.
Ce que certaines personnes font pour des raisons financières et pour garder un pas dans la vie active, c’est de continuer de travailler comme indépendant (pour leur société ou une autre société) après la prise de pension.
Vous pouvez en effet cumuler pension et activité professionnelle, mais attention à l’âge auquel vous ferez ceci. Avant 65 ans, vous risquez de voir votre pension amputée en tout ou partie. Après 65 ans, ce risque n’existe plus, peu importe les bénéfices, mais vous devrez continuer à payer des cotisations sociales (de solidarité).
Si vous souhaitez arrêter de travailler à votre pension, vous pouvez liquider la société. Ceci doit être fait via un acte notarié (coutant environ 1200 EUR) et il vous faudra aussi un rapport d’un·e réviseur·euse d’entreprise (coutant environ 1700 EUR) ou un·e expert·e-comptable certifié·e. Prévoyez donc un budget de 3000 à 4000 EUR en tout pour la liquidation. Cela peut être une occasion de sortir les derniers fonds de la société.
Pour votre information, déclarer une société en faillite, ce n’est possible que si la société a des dettes, ce qui n’est, espérons-le, pas votre cas.
Une alternative plus rentable d’organiser votre sortie serait de revendre votre société et de trouver donc un·e repreneur·euse pour votre société. Vous touchez alors une plus-value qui ne sera généralement pas taxée. Il est conseillé de se faire accompagner dans ce cas de figure. Vous trouverez des informations détaillées sur ce sujet dans cet article.
Si vous vendez uniquement le fonds de commerce, le montant de la vente sera mêlé au revenu de la société, taxé à l’Isoc.
Une revente s’organise bien à l’avance, et nous recommandons de vous renseigner sur les structures d’accompagnement et sur les aides disponibles en la matière. N’hésitez pas à consulter notre site et à nous contacter en cas de projet de revente.
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