Lorsque l’amour des dauphins mène à une prise de conscience écologique, et lorsque cette prise de conscience aboutit à la création d’une marque de vêtements de sport innovants, c’est l’histoire d’Alexae Wittock et de Rewild.
C’est dans les mers du sud que commence la belle histoire de Rewild, lorsqu’une toute jeune fille passionnée par les dauphins a la chance immense de nager en leur compagnie dans les eaux bleues des Caraïbes. Alexae Wittock se souvient : « C’était le coup de cœur assuré ! Dès ce moment, j’ai été déterminée à travailler avec les dauphins. J’ai su qu’un jour, j’en ferais mon métier ! »
Par amour des dauphins
Au moment d’entamer des études supérieures, elle opte donc pour la psychologie à l’ULB, séduite par l’importance des cours d’éthologie présents dans le cursus. « Je me suis directement dirigée vers la delphinothérapie pour les enfants autistes, handicapés », précise-t-elle. S’ensuivent des stages en Floride, en Israël et au Marineland d’Antibes, alors le plus grand complexe maritime en Europe hébergeant le plus grand nombre de cétacés en captivité, où elle finit par décrocher un contrat en tant que soigneuse animalière. « Ces spécialistes assistent le vétérinaire pour assurer le bien-être psychologique de l’animal, explique-t-elle. Les dauphins sont extrêmement intelligents. Il faut les stimuler en permanence. »
Prise de conscience
C’est là aussi que la jeune femme est pour la première fois confrontée à l’activisme écologique, au monde extérieur qui ouvre les yeux. « La captivité, c’est mal évidemment, concède-t-elle. Malheureusement, l’erreur a été commise il y a 40 ans, quand on capturait des spécimens pour les placer en bassin. Ceux dont je m’occupais étaient domestiqués au même titre que nos chats en appartement, nos oiseaux en cage ou nos chevaux en box. Nous faisions au mieux pour prendre soin d’eux physiquement et psychologiquement. Il est hors de question de les remettre en liberté sans autre forme de procès. Ils ne survivraient pas. » Avec quelques collègues, elle décide donc de trouver des alternatives, des solutions. Une formule s’impose : les centres de réhabilitation comparables aux grandes réserves naturelles africaines, où ces animaux pourraient être suivis de manière éthique et avec le moins possible d’interaction humaine. Mais implanter de telles structures fermées en pleine mer n’est pas une mince affaire.
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Le déclic
Nos spécialistes multiplient donc les missions de prospection. C’est lors de l’une d’entre elles qu’Alexae Wittock a un nouveau déclic : « La mer est polluée, ce n’est un secret pour personne. Mais en 2019, tout le monde parlait du plastique. Or les filets de pêche abandonnés, principalement constitués de nylon, posent un grave problème. Ils détruisent la faune et la flore marines. J’ai vu des animaux morts coincés dans ces filets, des coraux envahis… c’est terrible. Je me suis demandé ce qui était fait pour lutter contre cela, pourquoi personne n’en parlait en dehors de nous qui pratiquons la plongée. » Une heureuse rencontre va faire évoluer les choses, celle des responsables d'Healthy Seas, une ONG qui s’occupe du nettoyage des mers et achemine les filets récupérés en Italie, chez Aquafil. Cette usine les trie, les nettoie, et les broie. Le nylon exploitable est récupéré, rebobiné et tissé pour former l’ECONYL®, ce tissu extra-technique régénérable à l’infini et particulièrement bien adapté aux vêtements de sport, maillots de bain etc. Pour la jeune sportive qui passe une partie de l’année dans l’eau, tout devient clair : « Ce serait génial de soutenir cette organisation et ce fastidieux nettoyage des océans. » Pourquoi pas en mettant sur le marché des vêtements de sport écoresponsables fabriqués en ECONYL ?
Du rêve à la réalité
Aussitôt rentrée d’expédition, Alexae Wittock confie son projet à sa maman, Geneviève Kreilmann. Qui n’est pas bien difficile à convaincre. Il faut dire que cette thérapeute énergétique et professeure de Yoga avait longtemps caressé l’envie de créer sa propre gamme de vêtement sans jamais sauter le pas. Le concept retenu est simple : des tenues multi-activités, polyvalentes, hybrides, parfaites pour pratiquer plusieurs disciplines différentes, comme le snorkeling en mer grâce à la résistance à l’eau de mer et au chlore du tissu qui protège en outre la peau du soleil, ou encore les activités accessibles en salle de sport pour lesquelles les propriétés ultra galbantes et respirantes de la matière font merveille. « On peut donc faire et son yoga et pratiquer l’apnée avec le même vêtement, résume Alexae Wittock qui précise : Il s’agissait pour nous de contrer la fast fashion, la politique des grandes marques qui préfèrent créer des lignes destinées à la pratique d’un seul sport bien spécifique. Cela leur rapporte plus et encourage la consommation. La mode n’est pas du tout mon milieu d’origine. Je me suis lancé ce défi parce que je voulais faire quelque chose à mon échelle pour cette planète. Mais je ne veux pas faire de greenwashing, être une marque de plus sur le marché. Je veux être différente. »
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R&D
Nous sommes alors en pleine pandémie. Mais bien loin de le décourager, cette période offre au duo l’occasion de réfléchir à son projet, d’ébaucher ses premiers croquis, d’élaborer ses premiers prototypes. Avec l’aide de quelques stylistes dont l’activité était à l’arrêt et dans un atelier anderlechtois pour respecter la démarche éthique qui guide Alexae Wittock. Pour la fabrication, la jeune femme s’adresse d’ailleurs à un atelier portugais qui privilégie le ‘fait main’. « Cela allonge le processus de fabrication, reconnaît-elle, et impacte le prix de revient. Notre gamme est donc un peu plus coûteuse que les marques de la grande distribution, mais moins chère que les ténors du secteur car nous voulons rester accessibles à tout le monde. »
D’Anderlecht aux Caraïbes
Pour se donner les moyens de leurs ambitions, les deux apprenties-entrepreneuses lancent en avril 2021 un crowdfunding sur la plateforme Ulule basé sur le système de précommande. Le succès est au rendez-vous avec 120% de l’objectif initial atteint. « Cela nous a permis de lancer la production, de livrer tout le monde et de nous constituer un tout petit stock pour ouvrir notre site internet en septembre 2021 » se réjouit Alexae Wittock qui tient cependant à préciser que la marque se développe aussi et surtout via le bouche-à-oreille ou à l’occasion de ventes privées. Une évolution rapide qui permet aujourd’hui à Rewild d’être, entre autres, partenaire des trois clubs de sport bruxellois Aspria. Partie de quelques modèles seulement, la marque ne cesse d’élargir son offre et de se diversifier avec par exemple une gamme hommes ou un secteur maillot de bain sportif pour les femmes. « Tout est vraiment né au fur et à mesure et pour l’instant, j'aime beaucoup cela », commente Alexae qui continue parallèlement ses activités en matière de sensibilisation des plus jeunes à la cause environnementale, et d’expéditions à la rencontre de ses chers dauphins : « Mon apport à l’entreprise compte tenu de mon cursus », précise la cheffe d’entreprise qui prévoit de démarcher les boutiques du sud de la France et rêve de développer plus de deals B2B du côté des Caraïbes comme sa dernière collaboration dans les Turks & Caicos avec le club WaketoWake proposant du wakesurf éthique avec les dauphins sauvages peuplant ces eaux turquoises.
Et si…?
Ce parcours jusqu’ici sans faute n’a pas empêché Alexae Wittock d’éprouver quelques inquiétudes : « L’entreprise en elle-même n’a été créée qu’en janvier 2023 ! s’exclame-t-elle. J’ai commencé mes activités en tant qu’indépendante, free-lance ! On teste. On se demande si le projet a de l’avenir. Au début, j'étais fort sur la réserve car créer une société est une énorme responsabilité, c'est bien évidement SCARY mais EXCITING à la fois ! Mais vient un moment où il faut se lancer. Je l’ai fait et je ne le regrette absolument pas. » Dans la foulée, elle partage volontiers quelques réflexions qui résument bien son parcours et pourraient - pourquoi pas - inspirer d’autres candidats entrepreneurs : « Il faut croire en ses rêves. Tout est possible si on le veut vraiment. Il faut savoir doubler le cap sans avoir peur. On est notre propre ennemi. Il n’y a que nous qui nous mettons des barrières. Lorsqu’on ose franchir cette barrière et qu’on a une bonne idée, un bon projet, on est capable de tout. Quand c’est bien placé dans l’univers, rien ne peut nous arrêter. »
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