Commençons par déboulonner un mythe : une idée, en tant que telle, ne peut pas être protégée. Ni coffre-fort, ni brevet, ni copyright. Mais cela ne signifie pas que vous ne pouvez rien faire ! Alors, comment faire redoubler de vigilance ? Le goût du secret, évidemment, mais vos créations peuvent aussi faire l’objet d’un i-DEPOT. Un premier pas numérique pour préserver votre inventivité…
Une idée ! Cette étincelle lumineuse, cette représentation de l’esprit, cette projection de l’imaginaire. Un moteur indispensable pour un entrepreneur. Les idées ne sont ni bonnes ni mauvaises : elles sont essentielles dans un monde en constante évolution… Que ce soit pour :
- Démarrer une nouvelle entreprise ;
- Réinventer son business model ;
- Développer un avantage concurrentiel ;
- Repenser son approche commerciale ou son organisation ;
- Apporter des réponses aux défis actuels et futurs ;
- ou encore, imaginer des solutions innovantes.
Le point de départ de ces démarches entrepreneuriales est souvent une idée « au sens large » : une découverte ou un projet, une nouvelle formule ou un savoir-faire, un concept original ou l’ébauche d’un design, un processus ou une stratégie inédite, etc. Qu’elle soit déjà claire ou encore floue, l’idée existe d’abord dans votre esprit. Elle jaillit et s’affine au fil du temps. Mais elle est souvent suivie d’une crainte légitime : la peur d’être copié ou volé. Même si André Malraux disait « avoir assez d'idées pour qu'on puisse le voler sans lui nuire », le secret est souvent le seul recours pour les entreprises désireuses de protéger leur inventivité ou de précieuses informations. Mais ce silence n’est pas toujours possible…
L’idée d’un autre est parfois la mienne
Entre la naissance d’une idée et sa concrétisation, le chemin est souvent difficile à sécuriser. Et pour cause, une idée ne peut pas être protégée par un droit de propriété intellectuelle. Vous pensez au brevet ou au dépôt d’une marque ? Cela concerne uniquement l’aboutissement matériel de l’idée, par exemple, à travers un produit, un service ou un processus. Autrement dit, son expression concrète ou son développement, que la forme soit littéraire, artistique, audiovisuelle, fonctionnelle, etc. Non seulement une idée n’est pas « brevetable » à l’état brut, mais il est également compliqué de savoir exactement quand un concept est suffisamment concret pour bénéficier d’une protection.
Nombre d’exemples illustrent la complexité de la sauvegarde des créations originales. Il suffit de se pencher sur la genèse de Facebook, retracée dans le film « The Social Network », pour comprendre qu’il n’est pas toujours simple d’attribuer clairement la paternité d’une création. Même topo dans « The Founder », le long métrage qui retrace l’épopée de McDonald, où l’on voit les frères McDonald se faire subtiliser leur concept par un homme d’affaires, responsable (il est vrai) du succès de la chaîne de restaurants. Qui a tort ? Qui a raison ? Difficile de trancher. Steve Jobs, lui-même, n’hésitait pas à proclamer son penchant pour « le vol de grandes idées » (dans le documentaire « Triumph of the Nerds », sorti en 1996).
Idée, « je suis ton père »
Résumons la situation :
- Une idée ne peut pas être protégée, seule sa matérialisation le peut ;
- Le parcours créatif, de l’idée à la concrétisation — et une éventuelle protection par un droit de propriété intellectuel —, est parfois long ;
- Des travailleurs, des partenaires ou des financeurs sont amenés à en savoir plus sur votre secret ;
- Le risque est donc réel de voir naître des conflits, de se faire déposséder de son idée ou de subir des pratiques déloyales.
Cela aboutit à une question centrale : comment prouver que vous êtes le père d’une idée ou d’un concept original ? Comment démontrer que vous avez été le premier à y avoir pensé ? L’Office Benelux de la propriété intellectuelle (BOIP) a conçu un outil très utile : i-DEPOT.
i-dépot, qu'est-ce que c'est ?
Cette « consigne » numérique permet de prouver l’existence d’une création à une date déterminée, ainsi que l’identité de son concepteur. Rappelons qu’un i-DEPOT ne confère aucune protection ni aucun droit de propriété intellectuelle, mais c’est un premier pas important en vue de la protection d'une idée ou d'une création en phase de développement.
L’i-DEPOT vous permet donc de mettre à l’abri différents types de créations : un concept, un savoir-faire, un prototype, un design, un scénario, le code source d’un logiciel ou une innovation. Dès l’origine et jusqu’à l’aboutissement, en passant par toutes les phases de développement et de commercialisation, cet outil vous offre plusieurs avantages :
- Une preuve légale, datée et authentique de la paternité de votre idée, auprès d’une instance fiable et officielle ;
- Un moyen de preuve accepté dans l’ensemble de l’Union européenne ;
- Un atout juridique en cas de conflit avec d’anciens travailleurs de votre entreprise, des partenaires ou des concurrents ;
- Une consigne électronique sécurisée pour une période de 5 ans, facile à mettre en place et relativement peu coûteuse (à partir de 37 euros).
Comment procéder ?
Après avoir créé votre compte sur My BOIP, il vous suffit de choisir le type de création à consigner et de télécharger vos annexes. Ces documents doivent être aussi détaillés et complets que possible.
Le coût ? Un i-DEPOT pour une période de 5 ans revient à 37 euros en ligne (ou 47 euros pour la version papier). Vous pouvez également opter pour une prolongation du délai de conservation (26 euros) ou opter, dès le départ, pour une période plus de 10 ans (53 euros).
Si vous êtes du genre à avoir une idée à la minute, le BOIP vous permet d’ouvrir un compte crédit, afin de bénéficier de l’usage régulier de l’i-DEPOT. Concrètement ? Cela vous coûtera 209 euros pour l’activation et 262 euros pour 20 crédits ou 523 euros pour 50 crédits.
Secret ou public ? Vous pouvez, à tout moment, gérer votre i-DEPOT. Par exemple, prolonger le délai de conservation, le transmettre à un tiers ou encore le rendre public, partiellement ou intégralement. En effet, si le secret a du bon, il peut parfois s’avérer utile d’alerter la planète de vos idées : que ce soit pour trouver des partenaires ou des financeurs.
Le BOIP propose la possibilité de publier votre i-DEPOT sur la plateforme i-D Space (pour 21 euros). Tout ou partie de vos créations deviennent ainsi accessibles au public, mais vous gardez la preuve officielle de la paternité.
Une « suzette » juridique
Pour défendre ses « secrets d’affaires »
Comme expliqué, un i-DEPOT constitue une première garantie pour votre parcours créatif. Mais cet instrument s’avère également salutaire pour les entreprises désireuses de préserver la confidentialité d’informations précieuses ou sensibles, sous le « parapluie » juridique offert par le « secret d’affaires ». En effet, sous l’impulsion de l’Union européenne, la notion de « secret d’affaires » bénéfice désormais d’un cadre légal clair, afin de protéger les entreprises contre la divulgation et l’utilisation de ses secrets.
Concrètement ? Si vous mettez vos « secrets d’affaires » à l’abri d’un i-DEPOT, vous disposez d’une preuve indubitable que vous étiez en possession, à une date déterminée, d’une information dévoilée ou volée. En outre, la « consigne » numérique tend à démontrer que vous avez mis en œuvre toutes les dispositions nécessaires pour protéger vos secrets d’affaires.
Pour collaborer
L’inspiration est plus que jamais collective : les entreprises puisent leurs idées et accomplissent leurs processus d’innovation avec le concours de partenaires, d’acteurs externes ou d’un écosystème. Cela signifie que vous pouvez être amené à ouvrir votre boîte à secrets pour partager vos idées avec des tiers : partenaires, investisseurs ou associés potentiels.
Mais comment s’ouvrir tout en assurant ses arrières ? Grâce à la clause de confidentialité (NDA ou non-disclosure agreement). Un document, signé par toutes les parties concernées, qui définit le cadre de la collaboration et les conditions dans lesquelles vous êtes prêt à communiquer votre création. Pour cette raison, le BOIP offre la possibilité de créer un NDA numérique, directement relié à votre i-DEPOT. Un levier supplémentaire pour préserver le caractère confidentiel de votre idée et mieux vous armer en cas de conflit sur la paternité de la création.
Et après ?
Si un i-DEPOT est utile au cours des premières phases du processus d’innovation viendra le moment de la matérialisation. Vous allez concrétiser l’essai et extérioriser votre idée ! Il faudra alors passer à l’étape suivante : protéger la propriété intellectuelle et pouvoir ainsi revendiquer des droits sur vos créations (au sens large). Du brevet au dépôt d’une marque, en passant par les droits d’auteur, les droits de dessins et modèles, etc. À chaque droit de propriété intellectuelle, ses règles spécifiques et son fonctionnement propre (automatique ou non, conditions applicables, etc.).
Vous ne trouvez pas votre chemin dans ce dédale de possibilités ? C’est normal, la matière est assez technique et exige souvent l’accompagnement d’un spécialiste pour une protection réellement efficace. Voici déjà quelques tuyaux de départ.
Un dernier tuyau… Gardez dans un coin de votre tête qu’il est possible de solliciter un financement pour couvrir les frais d’obtention et de validation de brevets. Une intervention d’Innoviris, à hauteur de 50% des coûts éligibles. Conditions et détails sur le site d’Innoviris.
À vos idées !
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