Situation
L’entrepreneur qui visite le Centre pour Entreprises en difficulté (BECI) est actif dans le secteur de la menuiserie. Ayant perdu deux clients importants, il souffre financièrement et accuse de nombreuses dettes. La visite d’huissiers l’a effrayé : ils menacent de saisir son habitation. Il a entendu parler de la protection possible du domicile privé et souhaiterait pouvoir en profiter.
Conseils
Effectivement, par le biais d’une simple déclaration devant notaire, les indépendants (indépendants personnes physiques ou gérants d’entreprise) peuvent protéger leur domicile familial en le rendant insaisissable pour leurs créanciers professionnels.
Les sociétés ne sont donc pas visées par cette protection, celle-ci étant limitée aux personnes physiques (la constitution d’une société permet en effet de distinguer le patrimoine privé du patrimoine professionnel) . Par personnes physiques, on entend : les commerçants, les artisans et les personnes exerçant une profession libérale.
La protection ne concerne que la « résidence principale » de l’indépendant. Ce terme désigne en réalité le lieu où l’indépendant vit effectivement seul ou avec sa famille la majeure partie de l’année. Il ne s’agit donc pas nécessairement de son domicile ou encore du lieu où il exerce son activité professionnelle.
La protection s’accorde à l'immeuble dont le travailleur indépendant est propriétaire, usufruitier ou copropriétaire.
Dans le cas où l’immeuble est à usage mixte (professionnel et d’habitation) deux hypothèses doivent être envisagées :
- Si l’indépendant exerce son activité dans l’immeuble où il a établi sa résidence, et que la surface consacrée à son activité professionnelle représente moins de 30% de la surface totale de l’immeuble : tout l’immeuble pourra être déclaré insaisissable.
- Si l’indépendant exerce son activité dans l’immeuble où il a établi sa résidence, et que la surface consacrée à son activité professionnelle représente 30% ou plus de la surface totale de l’immeuble : seule la partie affectée à la résidence pourra être déclarée insaisissable. Dans ce cas, l’indépendant devra, au préalable, établir un acte divisant clairement la propriété en deux parties : une partie privée et une partie professionnelle.
Cette déclaration d’insaisissabilité a un coût de 1000 euros (500 euros pour frais de notaire et 500 euros de droit d’enregistrement) mais cela en vaut la chandelle.
La protection est offerte aux indépendants qui exercent à titre principal, mais depuis récemment, aussi à ceux qui exercent à titre complémentaire ainsi qu’aux pensionnés autorisés à exercer une activité indépendante
La protection ne vaut que pour les dettes nées après la déclaration d’insaisissabilité et ne peut donc pas viser des dettes antérieures.
C’est ici que le bât blesse : notre entrepreneur ne peut pas espérer échapper aux différentes poursuites et conséquences.
La démarche aurait dû être réalisée auprès du notaire de son choix au démarrage de son activité ou antérieurement, en tous les cas. Il reste à trouver des solutions pour redresser la situation
A retenir !
La protection ne joue que pour les dettes nées après la déclaration d’insaisissabilité et ne vise que les dettes liées à l’activité professionnelle comme par exemple les dettes à l’égard de la tva, des fournisseurs, des organismes de crédit, etc.
La déclaration d’insaisissabilité, comme la plupart des déclarations, est assez réglementée quant à son fond et à sa forme. Celle-ci doit en effet contenir, et ce sous peine de nullité, une description détaillée (rédigée par le notaire) de l’immeuble et des droits que l’indépendant détient sur celui-ci, ainsi que la qualité de travailleur indépendant que le notaire vérifiera. Prévoyez le temps nécessaire. Prenez-y vous à temps.
Elle sera ensuite transcrite par le notaire dans un registre spécifique tenu au bureau du conservateur des hypothèques, date à laquelle elle sera considérée comme étant effective.
A noter enfin , le notaire ne peut recevoir la déclaration qu'après avoir reçu l'accord du conjoint du travailleur indépendant.
Article réalisé par Olivier Kahn, coordonnateur du Centre pour Entreprises en difficulté (BECI)