Pour être accompagnées dans leur développement, les entreprises bruxelloises peuvent faire appel à toute une série de boites de consultance plus prestigieuses les unes que les autres. Mais une autre voie est possible, un peu moins connue des entrepreneurs : le recours à une « Junior entreprise » liée à une Haute école ou à une université. Parmi elles, il y a l’ICHEC Junior Consult. Nous avons rencontré Sébastien Nibelle (Consulting director) et Lucas Lefevre (Communication manager) qui nous expliquent tout sur le fonctionnement de leur Junior Entreprise.
Pourriez-vous expliquer l’historique d’ICHEC Junior Consult ?
Le mouvement international Junior Entreprises a été créé il y a près de 100 ans, et c’est à Louvain-la-Neuve (UCL) que la plus ancienne junior entreprise belge a été créée il y a une trentaine d’années.
Pour ce qui est d’ICHEC Junior Consult, c’est en 2011 qu’elle a vu le jour. Des étudiants de l’époque avaient envie de professionnaliser leurs connaissances théoriques et se sont lancés dans l’aventure. Ils ont commencé à 2 ou 3, et nous sommes maintenant 40 membres au sein de l’ASBL. Du chemin a été parcouru !
La Junior Entreprise est accessible à tous les étudiants de l’ICHEC à partir de la BAC2, qui ont envie de développer leurs compétences professionnelles tout en bénéficiant d’une plus-value pédagogique. Il n’y a pas de compétences requises à la base, c’est surtout la motivation qui va compter.
ICHEC Junior Consult est reconnue au niveau belge et européen puisque la Junior Entreprise a remporté plusieurs récompenses, avec notamment le prix de “Best Belgian Junior Entreprise 2021”.
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Comment êtes-vous organisés au sein de l’équipe ?
Il y a 4 administrateurs dans l’ASBL, qui chapeautent chacun un ou plusieurs départements. Et il y a 7 départements en tout dont le plus important est le département Consultance qui se compose de 12 consultants et 3 managers.
La Junior Entreprise fonctionne en fait comme une entreprise classique, selon des méthodes de management saines que l’on apprend dans notre cursus. La gestion d’équipe est vraiment essentielle dans le projet, et les managers ont très bien conscience de cela. D’ailleurs, les administrateurs et les managers consacrent plus de temps à l’ASBL que les autres membres de l’ASBL.
Il y a également un regard extérieur de la part des professeurs de l’ICHEC, qui ont un rôle de conseil et d’expertise.
Le réseau Alumni, qui est composé d’anciens de l’ASBL, est également mobilisable pour des conseils. Ces personnes sont généralement encore très attachées à la structure et posent un regard professionnel sur le travail des étudiants actuels.
Qu’apportez-vous aux entreprises ? De quelle manière ?
On est actif dans 4 domaines d’expertises différentes : finance, marketing, management international et stratégie.
Nos forces qui nous permettent de nous démarquer des concurrents (boites privées et autres Junior Entreprises) sont celles-ci : forte réactivité, prix compétitifs, travaux de qualité, innovation et créativité.
Ce qui est vraiment important, c’est qu’il y ait une réelle plus-value pédagogique pour les étudiants sur chaque projet, sinon ça n’aurait pas de sens de s’investir dans ces projets.
Les étudiants ne sont pas rémunérés pour leur travail et les revenus sont dès lors intégralement réinvestis dans l’ASBL : événements à l’étranger, formations, bien-être des membres,…
Comment se passe concrètement l’accompagnement d’une entreprise ?
L’accompagnement est assez similaire à celui proposé par une boite de consultance classique. On commence le travail sur base d’une demande spontanée ou suite à la prospection qui est faite par les équipes.
On répond à la demande de l’entreprise en moins de 24h. Une première rencontre a alors lieu entre le département Business Development et l’entreprise à accompagner. On crée ensuite l’équipe projet avec un project manager et des juniors consultants. La durée de la mission varie entre 4 et 12 semaines. À la fin de la mission, il y a la remise du rapport final et une présentation des résultats de la mission dans les bureaux de l’entreprise.
L’équipe Business Development reprend alors le lead, et procède à une évaluation du travail fourni par l’entreprise. Cela permet d’avoir un feedback sur ce qui a été fait.
Entre 10 et 15 projets par an sont accompagnés par ICHEC Junior Consult.
Quel est votre public-cible ?
Le public-cible est très variable, et va de l’indépendant (salon de coiffure, profession libérale,…) à la multinationale.
On a même eu un projet récemment avec hub.brussels, en économie circulaire. Le public-cible est vraiment très large !
Et pour donner un exemple d’entreprise privée d’une certaine taille, nous avons travaillé avec Décathlon en 2022. Le but était de les accompagner dans leur transition durable. On leur a confirmé que le développement de leur activité de seconde main était une excellente opportunité, et avons élaboré pour eux une étude de marché et un plan de stratégie.
Comment fixez-vous le prix ?
Le prix évolue en fonction de la taille de l’entreprise, ce qui nous différencie des autres Junior Entreprises. Il y a chez nous une volonté de promouvoir l’entrepreneuriat et d’aider les petites structures qui n’ont pas les moyens de s’offrir un consultant privé.
Nous essayons de faire de la prospection dans des secteurs qui auraient besoin de soutien. C’est ainsi que nous nous sommes notamment adressés au secteur du cinéma en 2022, ce qui a mené à l’accompagnement du cinéma Palace.
On cherche la plus-value à la fois pour l’entreprise et pour les étudiants qui sont sur le projet.
Est-ce que cette activité n’empiète pas trop sur vos études ?
Nous apprenons à gérer notre temps, et nous développons une certaine entraide entre les membres. En réalité, beaucoup d’étudiants ont de meilleurs points depuis qu’ils sont entrés dans la Junior Entreprise !
Nous apprenons à bien étudier, cette aventure de la Junior Entreprise nous aide clairement au niveau scolaire. Les professeurs voient d’ailleurs la différence entre un étudiant qui est dans ICHEC Junior Consult et un étudiant qui n’y est pas.
Il y a une vraie plus-value pédagogique : raisonnement, présentations devant les entreprises, etc.
On retrouve beaucoup de profils différents dans l’équipe (différences au niveau socio-économique, de la facilité scolaire, etc.), ce qui est très riche pour tous les membres.
La clé, c’est qu’il faut être très motivé, avoir envie de se dépasser. Il y a une demande assez forte pour entrer dans la Junior Entreprise, il y a donc une sélection qui est faite, en plusieurs étapes. Il faut naturellement qu’il y ait un matching avec les valeurs de l’asbl : orienté qualité, entrepreneuriat, dynamisme, professionnalisme.
Nous avons un pôle « ressources humaines » qui est au service de l’épanouissement des membres, et qui a un regard sur l’implication de chacun. Mais on essaie d’instaurer un management le plus sain possible, que nous apprenons dans nos cours à l’ICHEC.
Qu’est-ce que la Junior Entreprise vous apporte pour votre futur professionnel ?
Elle nous apporte à tous les niveaux, que ce soit au niveau de la matière à proprement parler mais aussi des soft skills !
Certains étudiants se dirigent vers la consultance à l’issue de leurs études mais pas tous : d’autres vont vers des PME voire vers le secteur public.
Être passé par une Junior Entreprise permet d’avoir une vraie reconnaissance de la part des entreprises, qui peut être très utile lorsque l’on est dans un processus de recrutement.
Quel est le retour des entreprises ?
Nous avons presque toujours d’excellents retours.
On envoie un questionnaire d’évaluation aux entreprises en fin de projet, ce qui permet de mesurer l’impact de notre travail.
Les entreprises disent souvent que les étudiants pensent autrement, et qu’ils apportent une touche d’innovation et de créativité dans leurs projets.
Les boites de consultance privées n’ont-elles pas l’impression que vous marchez sur leurs platebandes ?
Tout d’abord, je dois dire que tout le monde trouve très positif le fait de faire bosser des jeunes et de leur offrir une telle opportunité !
Les entreprises de consultance voient vraiment les Junior Entreprises d’un très bon œil. Les étudiants actifs comme consultants dans les Junior Entreprises ont déjà de l’expérience, les boites de consultance peuvent donc engager des jeunes diplômés qui ont déjà fait leurs armes grâce à la Junior Entreprise. Tout le monde y trouve son compte !
Nous avons un partenariat avec trois entreprises de consultance : PWC Belgium, Cream Consulting et Wavestone Belgium.
Le partenariat est basé sur des workshops qu’ils proposent aux étudiants, du soutien sur des projets (tables de conversation avec Cream Consulting), etc.
Nous avons notamment eu un workshop sur le sujet de l’inclusion par AXA Belgique et un autre sur la cybersécurité par Wavestone. Les matières abordées sont très larges. Il y a en général quatre workshops par quadrimestre, dont certains dans les locaux des partenaires. Il y a également un workshop du réseau Junior Entreprise européen par quadrimestre, qui rencontre beaucoup de succès.
Votre jeune âge est-il parfois un frein vis-à-vis des entreprises accompagnées ?
C’est tout le travail du département Business Development en début de mission, qui va convaincre le client de travailler avec nous. Parfois il faut rassurer les entreprises. Mais s’il y a un préjugé, je peux vous dire qu’il s’éteint à la première rencontre !
Pour en savoir plus sur les Junior Entreprises… Il y a une quinzaine de Junior Entreprises en Belgique, actives dans divers domaines (business, droit, - ingénierie,…). Pour ce qui est des thématiques « Business », on retrouve deux Junior Entreprises sur le territoire de Bruxelles-Capitale : ICHEC Junior Consult et Solvay Consulting Club. Les équipes travaillent de mi-septembre à mi-juin sur les projets, mais les entreprises peuvent prendre contact avec les Junior Entreprises tout au long de l’année pour préparer une mission de consultance. Il existe une Confédération nationale qui rassemble toutes les Junior Entreprises belges. Au-delà de cette Confédération nationale, on retrouve également des confédérations européenne et mondiale. |