C’est ce qu’il est convenu d’appeler un commerce de proximité citadin mais aussi un nouveau concept urbain. La première implantation hors de France du réseau d’épiceries « day by day – mon épicerie en vrac » a vu le jour à Saint-Gilles en 2017 à l’initiative de Florian Piette et Arsènios Athanassiu, deux jeunes entrepreneurs pleins d’ambition et d’idéal.
L’ouverture de votre épicerie « day by day » faisait-elle partie de votre plan de carrière ?
Florian Piette : Tout au début de mes études, l’idée de me lancer dans l’entreprenariat me titillait, mais une fois sur les bancs de la Solvay Business School, j’ai décidé d’opter pour une carrière plus traditionnelle en entreprise. C’est ainsi qu’après l’obtention de mon diplôme et une année consacrée à voyager, j’ai décroché un job d’analyste. J’ai rapidement constaté que les contraintes et le manque de créativité liés à ce poste ne me convenaient pas.
Je me suis donc lancé dans un Erasmus for Young Entrepreneurs (EYE) puis ai profité de l’opportunité d’ouvrir un magasin franchisé offerte par « day by day – mon épicerie en vrac » que je suivais régulièrement sur facebook. Cela faisait un moment qu’Arsènios et moi parlions d’une affaire bien à nous. Nous avons décidé de sauter le pas.
Dites-nous-en un peu plus sur le programme Erasmus for Young Entrepreneurs qui a grandement influencé la suite de votre parcours.
F.P. : Le programme Erasmus for Young Entrepreneurs est une opportunité géniale accessible aux jeunes et nouveaux entrepreneurs. Il est malheureusement bien moins connu que son homologue estudiantin. C’est très dommage car il est au moins aussi utile et formateur. Leur principal point commun est sans doute la bourse octroyée par l’Union Européenne aux participants à chacun des deux programmes. Durant mes études, le programme Erasmus destiné aux étudiants m’a conduit à Maastricht où j’ai pu profiter de son côté festif, international, multiculturel. Le contexte du programme EYE est totalement différent: il s’agit d’une véritable immersion en entreprise.
Si l’adéquation entre le stagiaire et l’entrepreneur qui l’accueille est bonne, les enseignements à tirer de l’expérience sont inestimables ! Une base de données permet de croiser les désidératas des entrepreneurs et des candidats stagiaires. Pour ma part, j’ai cherché moi-même l’entreprise susceptible de m’intégrer. Mon but était double : avancer sur mon projet tout en étant rémunéré et le confronter à la pratique.
Racontez-nous votre expérience
F.P. : J’ai toujours été sensible aux problèmes environnementaux. Parallèlement à mes études de commerce, j’ai même suivi en élève libre un master en environnement où je me suis particulièrement intéressé à l’éducation à la santé et à l’environnement. Au printemps 2015, j’ai eu la chance grâce au programme Erasmus for Young Entrepreneurs de vivre une immersion totale à la Recyclerie, un lieu unique implanté dans une ancienne gare abandonnée le long de l'ancienne ceinture ferroviaire parisienne. Dans ce lieu hybride coexistent harmonieusement différentes activités telles qu’un bar et un restaurant utilisant les produits de l'agriculture urbaine, un atelier de réparation, un poulailler, un potager et la plus grande ferme d'aquaponie urbaine (forme d'aquaculture intégrée qui associe une culture de végétaux en « symbiose » avec l'élevage de poissons).
J’y ai appris l’essentiel de ce qu’il faut savoir en matière de gestion opérationnelle et financière d’une entreprise, mais aussi comment mixer succès commercial et valeurs sociétales, en l’occurrence l’éducation à l’environnement. L’ouverture de notre magasin « day by day – mon épicerie en vrac » constituait donc une suite logique à cette démarche.
Pourquoi le vrac ?
F.P. : La vente en vrac permet de lutter contre le gaspillage alimentaire et favorise la réduction des déchets. Nos clients sont en effet libres de choisir la quantité de denrées dont ils ont besoin et sont invités à utiliser leurs propres contenants tels que des sachets en papier ou en tissu, des récipients en plastique ou des bocaux en verre. Préalablement à l’ouverture de notre magasin, nous avions même mis en place une collecte de bocaux afin de permettre aux curieux de découvrir notre philosophie dès leur première visite. C’est notre manière de concilier activité commerciale et impact positif sur la planète.
Après votre premier mois d’activité, quelles sont vos premières constatations ?
F.P. : Notre boutique suscite incontestablement la curiosité. Il y a beaucoup de passage dans notre magasin comme sur notre page facebook et ce contact quotidien avec les habitants du quartier dans lequel nous sommes implantés me plaît beaucoup. Mais nous attendons encore que nos clients poussent notre porte pour faire leurs ‘vraies’ courses.
Un mois après l’ouverture, nous sommes en effet en-dessous des chiffres français. Mais il faut savoir qu’en France, « day by day » est LA référence de l’épicerie en vrac et que chaque nouvelle ouverture suscite un véritable engouement, alors qu’en Belgique, la marque n’est pas encore reconnue. Mais nous sommes confiants car nos nouveaux clients ne manquent jamais de revenir.
Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui désire lancer une activité indépendante ?
F.P. : Je ne saurais que lui conseiller de se plonger avant toute chose dans la réalité du terrain: rien de tel que de travailler pendant plusieurs mois dans le secteur dans lequel on veut se lancer. Dès que ce sera possible, je serais d’ailleurs prêt à accueillir un ‘young entrepreneur’ bénéficiant du programme Erasmus afin de renvoyer la balle mais aussi d’apprendre de cet échange enrichissant.
Il est aussi souhaitable de miser sur la complémentarité des associés. Dans notre cas, je suis meilleur gestionnaire et Arsènios est plus tourné vers l’action, je suis plus calme et lui plus sanguin. Certes, cela provoque des micro conflits, mais au final c’est positif.
Je lui recommanderais aussi la patience. Il doit être conscient que les aides à l’installation existent et méritent d’être demandées mais que le processus est lent, que les différents plannings ne sont jamais respectés mais qu’il faut quand même se lancer.
Et enfin, je l’inciterais à profiter de la période de pré-ouverture, celle durant laquelle on a encore du temps, pour parler le plus possible de son projet au plus grand nombre de personnes possible, pour créer un réseau que l’on pourra activer ultérieurement en cas de besoin.
Pour plus d’informations à propos du programme Erasmus for Young Entrepreneurs (EYE), n’hésitez pas à contacter Pierre Herfurth au sein de hub.brussels