Quel est le métier de Connectis ?
Christophe Genge : « A la base, nous sommes une société de services informatiques pur jus. Nous l'avons créée en 2002 et, au fil du temps, nous avons acquis de nouvelles compétences en interne de sorte qu'à l'heure actuelle, Connectis est en réalité une société bicéphale : d'un côté, nous avons une activité classique d'intégrateur informatique. C'est notre métier historique et dans ce cadre, nous nous adressons essentiellement à des PME occupant typiquement entre 40 et 200 salariés ; à côté de ce premier métier, nous avons également développé un département « cloud ». Nous sommes devenus un « cloud service provider », ce qui signifie que nous fournissons toute une série de solutions « cloud » (backup, monitoring, partage de fichiers, antispam, antivirus) à un réseau de revendeurs qui, eux-mêmes, proposent nos solutions « cloud » à un public professionnel, TPE et PME. »
Est-ce qu'on peut résumer votre activité en disant que vous offrez toute la palette des services informatiques nécessaires à une petite entreprise ?
Christophe Genge : « Oui. Nos proposons effectivement tous les services, de la consultance à l'implémentation en passant par la maintenance et l'assistance, toujours en fonction des besoins de l'entreprise. Maintenant, je dirais tout de même que notre valeur ajoutée est maximale quand un client nous demande de couvrir l'ensemble du spectre, depuis l'analyse de ses besoins (la consultance) jusqu'à la mise en place de toute l'infrastructure dont l'entreprise a besoin, avant d'en assurer la maintenance et, le cas échéant, l'assistance en cas de pépin. Connectis compte pour ce faire une dizaine de salariés mais nous utilisons aussi les services d'une dizaine de consultants indépendants très spécialisés en fonction des besoins de nos clients. »
Vous avez créé Connectis en 2002 avec Nicolas Demuynck et vous êtes toujours là. Le duo a donc bien résisté au temps ?
Christophe Genge : « Oui. Nous étions deux à la base, nous sommes toujours deux aujourd'hui et nous occupons toujours les mêmes fonctions qu'au début. Il faut dire que, quand nous avons décidé de créer cette société, mon associé et moi voulions le faire sur la base de la complémentarité de nos compétences : lui disposait des compétences techniques pointues indispensables tandis que moi, je m'occupais plutôt de la partie commerciale et financière. »
Créer votre entreprise, c'était une évidence ?
Christophe Genge : « C'était une évidence, oui. Je travaillais comme salarié depuis plusieurs années et je sentais bien qu'il fallait que je puisse travailler en étant indépendant, que je sois responsable des choix que je posais. C'était la même chose pour mon associé, qui travaillait d'ailleurs dans la même structure que moi. »
Quels souvenirs gardez-vous de la création de l'entreprise ?
Christophe Genge : « Cette période, je la qualifierais d'exaltante. C'était très excitant de créer notre société. Mais aussi très difficile. D'abord, parce qu'on travaillait non-stop. Bon, sur ce point, ça n'a pas vraiment changé...
Le plus difficile a été de trouver nos premiers collaborateurs. Comme petite structure, on a eu du mal à attirer les talents dont nous avions besoin, du fait que la culture d'entreprise n'avait pas encore réellement éclos, que l'entreprise n'avait pas encore une notoriété suffisante et que, bien sûr, les moyens financiers étaient forcément limités.
Et en plus, nous avons créé la société juste après l'éclatement de la bulle Internet. C'était une période de crise au niveau du marché sur lequel nous entrions mais, en même temps, je crois qu'on est plus fort quand on naît en période de crise. Il faut bien dire aussi que d'autres crises sont survenues depuis, d'une certaine manière, nous y sommes habitués, gérer le changement fait probablement partie de notre ADN. Il est vrai aussi que dans notre secteur d'activité, les changements sont tellement rapides qu'on doit tout le temps être capable de changer notre mode de réflexion et notre mode de fonctionnement. Un exemple concret : nous avons longtemps vécu dans un modèle Capex avec nos clients, l'entreprise investit dans une infrastructure informatique ; maintenant, nous sommes passés à un modèle Opex, dans lequel les clients paient en fonction de leur consommation de services informatiques, « pay as you use ». »
Est-ce qu'au moment de créer votre entreprise, vous avez reçu un conseil qui vous a particulièrement aidé, qui a fait la différence ?
Christophe Genge : « Non, cela n'a pas été le cas. Nicolas et moi étions employés dans une société, nous avions envie de nous mettre à notre compte et nous avons tout simplement décidé de créer la société comme résultante de ce qu'on voyait comme potentialités dans le marché. Il ne nous a pas semblé utile de chercher des conseils extérieurs... ce qu'aujourd'hui, pourtant, je recommanderais à quelqu'un qui souhaiterait créer sa société. Il est absolument essentiel de réunir le plus d'informations possible sur le marché dans lequel on souhaite se lancer. Il faut aussi bien connaître les contraintes de l'univers dans lequel on envisage de se lancer. »
Pas de conseils au début donc, mais par la suite ? Rien non plus ?
Christophe Genge : « Au début, c'est vrai, on a eu relativement peu de conseils mais nous nous sommes vite rendu compte que nous devions nous nous aussi être accompagnés. Nous avons donc beaucoup travaillé avec des consultants externes spécialisés en stratégie, en management, qui nous ont beaucoup aidé à nourrir nos réflexions. Ce qui nous a permis de faire énormément évoluer la société en termes de maturité interne. Nous avons par ailleurs bénéficié très vite des conseils d'acteurs économiques importants de la Région de Bruxelles Capitale, je pense notamment à la SRIB – qui fait d'ailleurs partie de nos actionnaires – ou à hub.brussels, dont les conseils se sont à chaque fois révélés judicieux. »
Au cours de ces 13 années, avez-vous reçu un conseil stratégique qui vous a marqué ? Qui aurait modifié peut-être votre façon de travailler ?
Christophe Genge : « Nous avons reçu beaucoup de conseils importantes. Mais il y a une phrase qui à mon sens surpasse tous les autres conseils : quand il y a un doute, il n'y a pas de doute. Dans tous les choix qu'un chef d'entreprise est amené à faire, quelle que soit la démarche entreprise, s'il y a le moindre doute quant à la pérennité du projet ou sa faisabilité, c'est que ça n'ira pas. Pour ce qui me concerne en tout cas, ce constat s'est révélé vrai à tous les coups. Chaque fois que j'ai eu un doute, et que j'ai malgré tout persisté, ça s'est mal passé. Nous vivons dans un monde où il faut prendre des décisions rationnelles, c'est tout à fait évident, mais il faut aussi laisser une place au feeling. »
Si un jeune venait vous voir pour vous parler d'un projet d'entreprise, que lui diriez-vous d'abord ?
Christophe Genge : « Je lui demanderais d'abord s'il est vraiment sûr de vouloir le faire. Parce que je vois beaucoup d'indépendants et de jeunes créateurs d'entreprise qui ont du mal. Or, c'est une vie à laquelle beaucoup de gens ne sont pas préparés, entre autres parce que les gens ont une image de l'indépendant qui ne correspond pas à la réalité, image qui me semble un peu trop rose par rapport à la réalité. C'est dur, être indépendant ! Donc, le meilleur conseil qu'on puisse donner à ceux qui souhaitent se lancer, c'est d'aller à la rencontre de celles et ceux qui l'ont fait, pour mesurer ce que cela signifie vraiment comme choix de vie. »
Interview : Adrien Mintiens