Une entreprise peut être connue sous différents noms : dénomination sociale, nom commercial, enseigne. Ces notions prêtent souvent à confusion. Quelle est la différence entre toutes ces appellations ?
1. Le nom commercial
Qu’est-ce que le nom commercial ?
Le nom commercial est l’appellation sous laquelle une entreprise exerce ses activités commerciales. Il permet donc d’identifier l’entreprise, mais également de la distinguer de ses concurrents. Généralement constitué d’un signe verbal, il est fréquent qu’une entreprise recoure également à l’emploi d’éléments graphiques (logos, illustrations, typographie).
Outre la fonction identitaire, le nom commercial remplit un rôle publicitaire, car c’est sous ce nom que votre entreprise sera connue du grand public, ce qui vous permet de forger une renommée auprès de vos clients et les fidéliser par la même occasion.
Le nom commercial peut être identique à votre nom de famille ou à la dénomination sociale de la société. Mais il peut également s’agir d’un autre nom, inventé ou de fantaisie.
Vous pouvez d’ailleurs parfaitement décider d’utiliser plusieurs noms commerciaux afin de distinguer plusieurs secteurs d’activités.
Par exemple, la société espagnole Inditex s.a. exploite les noms commerciaux « Zara » et « Zara Home » pour différencier son activité de vente de vêtements prêt-à-porter et de vente d’objets de décoration.
Attention à la confusion
- Un nom commercial n’est pas une marque, et vice versa ! Mais vous pouvez très bien décider d’utiliser un nom commercial identique à la marque sous laquelle vous désignez vos produits ou services. En déposant la marque, la protection de votre nom commercial pourra alors être renforcée.
Par exemple, la marque « Zara », qui est identique au nom commercial, a été déposée, tout comme la marque « Trafaluc », qui n’est par contre pas identique au nom commercial mais qui fait uniquement référence à une collection de vêtements commercialisée par Inditex s.a.
- Le nom commercial correspond le plus souvent à l’enseigne de l’entreprise ou du magasin. Celle-ci désigne à la fois l'appellation du point de vente (telle qu’apposée sur le bâtiment) et le nom indiqué sur les supports publicitaires (vitrine, véhicules, etc.). L'enseigne peut parfois inclure des éléments visuels (logo) qui complètent le nom commercial en tant que tel.
La typographie et le respect d’une charte graphique particulière des enseignes « Zara » et « Zara Home » font partie, avec l’élément verbal, de l’enseigne des magasins appartenant à Inditex s.a. (apposée sur la façade des magasins notamment).
Choisir votre nom commercial : des précautions à prendre !
Le nom commercial étant le nom sous lequel la clientèle identifiera votre entreprise, vous avez tout intérêt à ce qu’il soit facile à retenir et accrocheur ! Un nom commercial trop descriptif ou banal risque de ne pas être suffisant pour la différencier de vos concurrents. Le nom commercial doit aussi être assez distinctif pour être protégé contre des usages concurrents. Un boulanger ne pourra donc pas monopoliser l’usage du nom « pain » ou « boulangerie » dans son nom commercial.
Le choix est libre mais le nom commercial ne peut pas être trompeur ni porter atteinte à des droits détenus antérieurement par les tiers. Vous avez donc tout intérêt à vérifier que le nom commercial ne porte pas atteinte à une marque déposée (pour des produits/services similaires notamment) ou à un autre nom commercial déjà utilisé dans la même région.
Comment le nom commercial est-il protégé ?
Le nom commercial est protégé par son premier usage public, visible et permanent. Par exemple, sous forme d’enseigne, sur les documents publics de l’entreprise, les vêtements professionnels, etc. C’est donc une antériorité d’usage qui octroie le monopole, sans qu’aucune formalité (dépôt, enregistrement, inscription dans un registre) ne soit nécessaire. Mais la protection du nom commercial se limite en conséquence au territoire sur lequel il est effectivement utilisé.
Le premier usager d’un nom commercial pourra s’opposer à ce qu’un tiers utilise par la suite le même nom commercial, ou un nom commercial similaire dans ce territoire. Ce droit n’est cependant pas absolu, et est limité aux cas où il y a un risque de confusion par le public.
Le risque de confusion sera apprécié de manière concrète, au cas par cas, sur base de l’usage qui est fait du nom, tenant compte de la combinaison des critères suivants :
-
la similitude des noms commerciaux, d’un point de vue auditif, visuel et/ou conceptuel ;
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la similitude des activités des entreprises, c’est-à-dire les produits et services offerts. Il n’est pas tenu compte des activités potentielles de l’entreprise reprises uniquement dans son objet social mais ne faisant pas l’objet d’une exploitation réelle ;
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la proximité géographique des entreprises, tenant compte de la renommée du commerce, du rayonnement de l’offre commerciale, de la zone de chalandise, etc. L’emprise géographique peut donc varier avec le temps.
Afin d’apprécier le risque de confusion, le juge examinera la possibilité d’erreur dans le chef d’un public d’attention moyenne. Un nom commercial jouissant d’une certaine renommée bénéficiera d’une protection plus large, car le risque de confusion sera élargi.
Lorsque ces conditions sont remplies, l’usage non autorisé d’un nom commercial prêtant à confusion est assimilé à un acte contraire aux usages honnêtes en matière commerciale, et peut être sanctionné par voie d’une action judiciaire.
Cependant, si le commerçant a choisi d’utiliser son nom de famille comme nom commercial, il ne pourra pas s’opposer à l’usage ultérieur d’un nom commercial identique ou similaire par un concurrent qui porte le même nom. Toute personne peut en effet librement utiliser son nom de famille pour identifier ses activités. Dans ce cas, le « nouveau venu » devra prendre des mesures pour éviter la confusion dans le chef de la clientèle (par exemple : il pourra ajouter un élément verbal ou visuel à son nom commercial).
2. La dénomination sociale
Qu’est-ce que la dénomination sociale ?
La dénomination sociale (ou raison sociale) est le nom officiel donné à une société, telle qu’il est repris dans les statuts publiés au Moniteur Belge. Un commerçant exerçant en personne physique ne dispose donc pas d’une dénomination sociale, qui ne concerne que les personnes morales.
La dénomination sociale permet l’identification juridique et administrative d’une société, sans avoir de fonction de marketing ou publicitaire. Elle peut être identique ou distincte du nom commercial (ou enseigne) de l’entreprise, ou de la marque utilisée par cette entreprise pour distinguer ses produits et services.
Par exemple, le restaurant « Schievelavabo » situé à l’Altitude 100 est géré par la société ayant pour dénomination sociale « Benelux Horeca Corporation », mais est uniquement connu sous son nom commercial précité.
La dénomination sociale, accompagnée de la forme juridique de la société (s.a., s.p.r.l., etc.) doit obligatoirement figurer dans les documents émis par la société (actes, factures, annonces, publications, lettres, notes de commandes, sites internet et autres documents papier ou électroniques), avec son numéro d'inscription auprès de la Banque-Carrefour des Entreprises (BCE) et de la TVA (sur les factures).
Comment est-elle protégée ?
Le Code des sociétés accorde un droit exclusif à toute personne morale qui utilise, la première, une dénomination sociale pour sa société, en l’inscrivant comme telle dans les statuts. La date prise en compte sera celle de la publication des statuts au Moniteur Belge. Chaque dénomination sociale doit être différente de celle de toute autre société. Si elle est identique, ou si la ressemblance est telle qu’elle peut induire en erreur, le commerçant pourra la faire modifier et réclamer des dommages et intérêts, s’il y a lieu.
A l’inverse du droit sur le nom commercial, celui sur la dénomination sociale est absolu, quelle que soit l’activité de l’entreprise et son rayonnement géographique. Mais la protection est limitée à la Belgique.
Bien entendu, lorsque la dénomination sociale est identique au nom commercial et/ou à la marque enregistrée par l’entreprise, les protections se cumulent.
A quoi faut-il faire attention dans le choix de la dénomination sociale ?
Comme déjà indiqué, la dénomination sociale doit être différente de celles déjà utilisées par d’autres personnes morales.
Par ailleurs, l’utilisation d’une dénomination sociale pouvant induire la confusion avec un nom commercial déjà utilisé constitue une pratique contraire aux usages honnêtes en matière commerciale.
Enfin, la dénomination sociale n’étant pas, en soi, utilisée pour distinguer des produits ou des services, mais uniquement pour nommer une société, elle ne porte théoriquement pas atteinte aux marques enregistrées. Cependant, reprendre dans sa dénomination sociale une marque enregistrée pourrait induire les tiers en erreur sur l’origine des produits ou services proposés et constituer, par ce fait, un acte déloyal. Il convient donc d’être prudent et d’éviter de reprendre une marque enregistrée, en particulier lorsque l’on pourrait considérer qu’il est tiré indûment profit de la renommée de la marque, ou que la reprise de la marque dans la dénomination sociale pourrait lui porter préjudice.
Avant d’opter pour une dénomination sociale ou un nom commercial, assurez-vous donc que la voie est libre :
- Banque Carrefour des Entreprises
- Moniteur belge sociétés
- Registre des marques Benelux
- Registre des marques communautaires
Cet article vous est proposé par Me Amélie Genin – JVM Avocats – http://www.jvm.be