Comment avez-vous eu l'envie de lancer votre propre marque de design ?
Sarah Kalman : « Ça faisait très longtemps que je souhaitais de développer ma propre ligne de produits. J'ai commencé à y penser très sérieusement il y a six ou sept ans. L'occasion s'est présentée fin 2014, lorsque j'ai quitté l'emploi que j'occupais. Ce fut comme une sorte de révélation, un coup de pouce du destin : j'allais pouvoir créer ma propre marque ! J'avais eu le temps de réfléchir en profondeur à ce projet d'autant qu'à la fin des mes études, j'avais réalisé un mémoire sur l'âme des objets, sur la manière dont le designer peut donner une âme au produit et faire battre notre coeur. Au fond, je n'ai fait que prolonger ce travail en lançant ma marque, que j'ai baptisée 'saint esprit'. »
Comment avez-vous procédé pour lancer votre marque, vos premiers produits ?
Sarah Kalman : « Au fil du temps et de mes recherches, je me suis rendu compte qu'il y avait à Bruxelles pas mal d'aides que je pouvais solliciter pour lancer mon projet. Je me suis donc adressée au MAD, où j'ai bénéficié d'un accompagnement avec Stéphane Rouffart et Maryem Ben Hadj Zekri, qui sont coach en design et plan financier. Après, c'est un accompagnement, ils ne font pas le travail à votre place. Et lancer sa marque, c'est vraiment beaucoup, beaucoup de travail. Mais ce que j'aime bien en discutant avec ces personnes, c'est qu'elles me renvoient un écho à mon discours. Et c'est en parlant que je vais me rendre compte si mon projet tient la route ou pas, si je vais me planter ou pas. Et j'avance comme ça. »
Et là, vous avez déjà créé votre entreprise ?
Sarah Kalman : « Pas encore. Ça prend énormément de temps de lancer sa propre marque. Il faut développer un produit, fabriquer un prototype, trouver les fournisseurs, les sous-traitants, partir parfois à l'étranger pour – par exemple – participer à une foire/un salon, etc. Mais j'espère très rapidement intégrer une couveuse d'entreprises où, j'imagine rester un an, un an et demi mais, à terme, je veux évidemment créer ma société, partir à l'international, créer de l'emploi, sortir une gamme de produits tous les ans.
Pour le moment, j'ai 4 produits : Joseph le porte-manteaux, Barnabé le coussin de sol, Eliot le pouf et Apollo la lampe. Ils sont disponibles sur mon site de vente en ligne, dans quelques boutiques aussi, j'ai participé à un important salon à Copenhague l'été dernier, j'y suis retournée en janvier. J'ai fait des petites expositions à Bruges, à Paris...
En fait, j'ai vraiment passé l'année 2015 à tester mes produits, à trouver leur positionnement sur le marché. C'est essentiel parce que je ne propose pas seulement des produits, je propose un univers, une histoire. Et j'ai déjà des idées de produits pour la suite... »
Quand vous jetez un coup d'oeil sur cette année qui vient de s'écouler, y a-t-il eu à un moment donné un conseil, une suggestion qui a joué un rôle majeur dans votre cheminement créatif ?
Sarah Kalman : « J'ai tendance à me mettre beaucoup la pression quant à la réussite de mon projet, sur le thème « je n'ai pas droit à l'erreur », « faut vraiment pas que je me trompe », « de toute façon, j'ai pas le choix, je suis obligée de réussir », etc.
Il y a quelques semaines, j'ai eu une discussion sur le sujet avec quelqu'un qui a remis l'église au milieu du village en me disant que oui, bien sûr, j'ai le choix. J'ai choisi d'aller dans cette direction, de créer ma marque alors que j'aurais pu partir à l'étranger, j'aurais pu persévérer dans la recherche d'un travail comme salarié mais, non, j'ai choisi de lancer mon projet. Et au fond, cette discussion m'a fait comprendre que je suis en quelque sorte maîtresse de ma décision. Et la pression est retombée, du moins cette pression-là.
Et puis, si mon projet ne marche pas, je trouverai bien un plan B. Créer une entreprise, de toute façon, c'est passer son temps à trouver des solutions aux problèmes. Je dois dire aussi que j'ai aussi un ami qui m'aide beaucoup, il est lui-même créateur d'entreprise et moi, ça m'aide beaucoup d'avoir autour de moi quelqu'un qui réussit, qui atteint ses objectifs. Ça me tire vers le haut. »
Votre expérience de créatrice d'entreprise est encore modeste mais, si vous deviez donner un conseil à quelqu'un qui souhaiterait se lancer comme vous, que lui diriez-vous ?
Sarah Kalman : « D'abord une mise en garde : c'est pas donné à tout le monde de créer sa boîte. C'est très très difficile ! C'est difficile moralement, mais ça vaut la peine de s'accrocher parce que c'est aussi très épanouissant. Ce qui est important, c'est de bien s'entourer mais aussi de créer un maximum d'opportunités. Il faut sortir de chez soi, rencontrer un maximum de gens. La chance, il faut la provoquer. »
Interview : Adrien Mintiens