Consultante le matin, chef d'entreprise l'après-midi... Sophie Remy combine deux métiers en attendant que sa petite entreprise décolle vraiment. Elle ne ménage en tout cas pas ses efforts pour développer sa marque Louis le sec, qui propose aux familles du linge de lit imperméable et anti-acariens à la fois efficace... et joli.
Sophie Remy : « Louis le sec est né de mon expérience de maman. J'ai trois enfants et j'ai eu beaucoup de soucis avec l'apprentissage de la propreté et les allergies liées à la présence d'acariens, bref, je passais ma vie à laver les couettes et les oreillers. A partir de là, j'ai regardé ce qui existait comme possibilités de protection sur le marché et le constat a été vite fait : pas grand-chose. Ou, du moins, pas grand-chose d'autre que du linge blanc ou écru, donc, pas très joli. Il m'a semblé qu'il y avait là une belle opportunité commerciale : offrir aux enfants du linge de lit classique mais sympa et, en même temps, une protection qui limite les contraintes pour les parents. En résumé : beau pour les enfants, pratique pour les parents. »
Quand avez-vous eu l'idée de lancer cette entreprise ?
Sophie Remy : « L'idée est venue il y a 8 ans mais le grand saut, je ne l'ai décidé qu'il y a 3 ans. Après, il a fallu une année pour étudier le projet, analyser le marché et, surtout, voir comment organiser tout ça parce que je ne suis pas du tout née dans le monde du textile... Il fallait trouver le coton, la membrane protectrice, les fournisseurs pour coller la membrane au coton, etc. Le processus a été relativement long puis, un jour, reçu les premiers échantillons de tissu laminé, qu'il a fallu tester en machine à laver pour vérifier que le produit était bien stable. Une fois cette stabilité confirmée, il a fallu lancer la marque, créer la collection. L'entreprise en tant que telle a été créée en juillet 2013, les premiers produits ont été commercialisés en janvier 2014. »
Où vos produits sont-ils commercialisés ?
Sophie Remy : «Essentiellement en Belgique et en France et, bien sûr, sur internet avec un webshop qui permet de commander et de se faire livrer où qu'on soit dans le monde. Dès le départ, j'ai fait beaucoup de salons à l'étranger parce que c'est indispensable et qu'en plus, ce type de prospection est extrêmement bien subsidié par la Région de Bruxelles-Capitale. Et donc, j'ai véritablement lancé la collection à l'occasion du salon PlayTime à Paris (NDLR : un salon international dédié à l'univers de l'enfant et des vêtements de maternité). Du reste, je continue à aller dans deux trois salons par an à l'étranger, l'idée étant en fait de trouver de nouveaux magasins qui acceptent de commercialiser mes collections. »
Est-ce qu'on peut dire que votre entreprise est toujours en phase de démarrage ?
Sophie Remy : « Oui, ça ne fait que deux ans que la commercialisation de mes collections a réellement commencé et, d'ailleurs, Louis le Sec n'est pas encore assez rentable pour que je puisse me payer une rémunération décente. Ce qui explique pourquoi je continue à combiner deux boulots, consultante le matin, chef d'entreprise l'après-midi... et le soir. Cela dit, mon business plan était assez conservateur, assez objectif – du moins je le pensais – mais je dois bien constater que je ne parviens pas à le respecter. Aujourd'hui, je revois entièrement mon business plan pour tenir compte de l'évolution des affaires. J'ai lancé beaucoup de nouveaux produits ces six derniers mois pour faire connaître la collection grâce à des produits moins chers que le linge de lit. C'est donc une question de prix, mais pas seulement : il se fait que les magasins souhaitent avoir des collections plus larges pour pouvoir faire des commandes plus importantes et avoir moins de fournisseurs. Pour être tout à fait franche, je ne m'attendais pas à être confrontée à ce problème-là. Tout cela m'oblige donc à revoir mon business plan et j'espère que ces adaptations vont effectivement faire décoller les ventes. »
Quand vous jetez un coup d'oeil en arrière, avez-vous l'impression qu'un bon conseil vous aurait manqué pendant cette période ou, au contraire, vous souvenez-vous d'un conseil qui vous a permis de faire vraiment évoluer votre entreprise ?
Sophie Remy : « Dès le départ j'ai veillé à bien m'entourer puisque j'ai lancé cette entreprise seule. D'abord, j'ai commencé le projet avec Solvay Entrepreneurs, puis je suis passée par le Réseau Entreprendre Bruxelles – dont je suis lauréate – qui proposent des accompagnements très structurés avec coach etc.
Mais, dans le même temps, je me suis adressée à hub.brussels pour des points plus précis liés en particulier au financement du projet. Ils m'ont aidée à m'y retrouver dans cet univers assez vaste tout de même et, surtout, m'ont aidée à lancer une campagne de crowdfunding à laquelle je n'aurais tout simplement pas pensé.
Sur le réseau Entreprendre, je suis devenue lauréate avant même la commercialisation de mes collections alors que, généralement, on devient lauréat après. Et dans mon cas, je dois dire « heureusement », parce qu'un des entrepreneurs consultés pour « prévalider » le projet m'a interpellée sur mon business plan parce que je n'avais prévu que du BtoB. Je me considérais comme « fabricante », pas comme « vendeuse » et, donc, je ne souhaitais pas me lancer dans la vente directe au consommateur final sur Internet. Il m'a dit que si je persistais dans cette voie, je n'y arriverais pas, notamment parce que les marges sont nettement moins élevées quand on passe par un réseau de distribution que quand on vend en direct au consommateur. Il avait parfaitement raison et c'est simple : aujourd'hui, je ne serais absolument pas rentable si je n'étais qu'en BtoB. »
Si quelqu'un s'adresse à vous pour vous demander conseil avant de lancer son entreprise, que lui diriez-vous d'abord ?
Sophie Remy : « De bien s'entourer. Pas forcément de s'associer avec quelqu'un, ça, c'est une question de caractère mais, en tout cas, oui, bien s'entourer, de solliciter des conseils. Le monde des entrepreneurs est finalement un petit monde et la plupart d'entre eux sont très aidants. Quand on est confronté à un problème, ça permet de gagner beaucoup de temps de s'adresser à quelqu'un qui l'a résolu avant vous. Ça peut être une question toute simple : les premières affiches que j'ai fait imprimer m'ont peut-être coûté 20 euros pièce, mais aujourd'hui, ça ne dépasse plus 50 cents parce que je sais à qui je dois m'adresser pour ce travail. Mais au bout du compte, chaque « petit » conseil qui permet de gagner quelques heures dans une journée, c'est super précieux, parce que ces heures-là, l'entrepreneur va pouvoir les consacrer à l'essentiel, le développement de son business. Et dans mon cas, c'est la prospection. Développer ma clientèle... »
Interview : Adrien Mintiens
Site: Louis le sec