Peut-on à la fois mener une activité entrepreneuriale et posséder le statut d’ASBL ? Peut-on œuvrer efficacement dans la communication et défendre ardemment la planète ? La réponse est résolument OUI pour MOJO Agency.
C’est l’histoire d’une agence de communication bruxelloise presque comme les autres. MOJO Agency propose en effet un large éventail de services à la pointe de la modernité et dispose d’un portefeuille de clients pour certains aussi prestigieux que la Croix Rouge, Enabel, AFD, Oxfam, CO2LOGIC, Missing Children Europe, European Climate Foundation ou même… hub.brussels. « Effectivement, notre positionnement actuel vis-à-vis de l’extérieur apparaît classique », concèdent Camille Chatelier et Benoît Rolin aux commandes de MOJO Agency depuis sa création en 2019. « Nous voulons nous conformer aux normes du marché, offrir la même qualité de services et de production que les agences traditionnelles. Celui ou celle qui nous consulte désire en effet la meilleure campagne du monde conçue par une équipe créative de grande qualité. »
Accélérer la transition
Mais l’analogie s’arrête là, car MOJO Agency se distingue comme l’une des rares agences créatives réellement engagées en Belgique. « Nous désirions mettre notre expertise, le métier que nous aimons, au service de la planète et de la transition sociale (gender equiality, access to health, access to education, etc », précise Benoît Rolin. « Nous travaillons pour des ONG, des fonds d’investissement à impact, des entreprises publiques, des startups engagées. Nous refusons par contre les sollicitations émanant des milieux religieux et politiques parce qu’elles ne correspondent pas à nos critères. Le but de l’agence, sa boussole, est l’accélération de la transition. »
ASBL à vocation commerciale
Et surtout parce que MOJO Agency fonctionne sous le statut d’ASBL, un modèle que les créateurs de l’agence désiraient disruptif en matière de fonctionnement et de rapport aux bénéfices. « Ceci fait de nous des fondateurs et non des actionnaires », détaille Benoît Rolin. « Nous ne détenons pas l’entreprise. Elle ne peut pas être rachetée. Il n’y a pas de notion de dividende ou de bonus au management. Les postes d’administrateur·ice n sont pas rémunérés. Ne sont rétribué·es que ceux et celles qui fournissent une prestation concrète.
» Les deux créateurs de MOJO Agency reconnaissent que leur entourage ne comprend pas toujours ce choix car en Belgique, beaucoup assimilent encore les ASBL aux ‘non profit organisations’. « Pourtant le code des entreprises a évolué récemment », objectent-ils. « Il donne plus de flexibilité aux ASBL qui peuvent désormais intégrer une activité commerciale. Nous faisons du profit. C’est même central dans notre mécanisme. La question devrait plutôt être : que faisons-nous de nos bénéfices ? La notion de profit est chez nous assez différente de ce qu’elle est pour une entreprise belge classique qui, les bonnes années, ristourne en général environ 33% de son bénéfice aux actionnaires. Ce n’est pas notre modèle. Ce profit nous est nécessaire, pour payer correctement les équipes, pour grandir, pour créer de l’impact via le ProBono, de l’emploi. »
Quelques contraintes
Contrariété notoire pour l’équipe de MOJO Agency : l’accès compliqué aux subsides. Ce qui navre Benoît Rolin : « Il faut que cela évolue. En excluant les ASBL des subsides classiques parce qu’elles ne sont pas nécessairement génératrices d’emploi, de valeur économique, les autorités bruxelloises partent encore du principe qu’elles appartiennent exclusivement à la catégorie des structures ‘non profit’ et fonctionnent sous perfusion. Aujourd’hui pourtant, il leur est possible d’être actif dans n’importe quel secteur et de générer des millions de chiffre d’affaires. Ce qui est intéressant, c’est la dynamique du projet, sa vocation à servir une cause et non les actionnaires. »
Dialoguer avec les entreprises
Avant de créer MOJO Agency, Camille Chatelier et Benoît Rolin ont suivi un cursus traditionnel : des études supérieures orientées vers la communication en France pour elle, en Belgique pour lui, puis de premières expériences professionnelles à l’international, en Asie pour la première, en Allemagne pour le second. Jusqu’à ce qu’aux abords de la trentaine, Ils prennent l’un et l’autre conscience de la crise contemporaine, se rencontrent et décident ensemble de créer une agence de communication à impact. Le monde de l’entreprise ne leur est donc pas étranger et ils comptent mettre à profit leur connaissance du milieu pour faire grandir MOJO Agency et progresser leurs idées.
Camille Chatelier : « Les ONG et les fondations pour qui nous travaillons actuellement sont déjà convaincues de l’urgence de la situation. Si on veut faire bouger les choses, il faut arriver à persuader les acteurs traditionnels de la nécessité d’agir. C’est un travail de longue haleine. » Benoît Rolin renchérit : « La transition est lente parce que la grande majorité des entreprises classiques ne réfléchissent pas assez aux questions environnementales et sociales. Or c’est à ce niveau que la transition devrait accélérer. Les petits efforts consentis par les grandes entreprises internationales peuvent avoir un énorme impact. Mais il ne faut pas non plus être parfait pour commencer à mettre en place des premières initiatives en faveur de la transition, et communiquer dessus, de manière transparente. En Belgique certaines entreprises n'osent pas mettre en lumière ce qu'elles font de bien par crainte d’être taxées de greenwashing. Nous considérons qu’une communication transparente est une bonne communication. »
Soutenir les petites structures
Et bien sûr, l’équipe de MOJO Agency compte bien continuer à aider les petits acteurs de terrain aux moyens limités mais aux besoins importants : « Tout le monde, tout type d’entreprise, qu’elle soit petite, grande, for profit, non profit, institutionnelle, doit s’y mettre, jouer un rôle dans la transition. Nous tenons absolument à trouver des solutions pour livrer de la qualité à des prix corrects aux petits acteurs de terrain dont l’impact est énorme en Belgique. Ils résolvent beaucoup de problèmes et ont besoin d’une communication séduisante et impactante sans avoir les moyens de d’offrir des services comparables à ceux des grandes structures. »
L’avenir en points de mire
Pour réussir cette double mission, MOJO Agency devrait s’enrichir dans les prochains mois de deux déclinaisons vouées à ces audiences spécifiques afin de servir efficacement et de manière personnalisée ses partenaires actuels, ses futurs clients et bien sûr la transition.
Benoît Rolin voudrait aussi envoyer un message à tous ceux et celles qui abordent l’entrepreneuriat et à leur entourage : « On propose à ces jeunes pousses de créer la startup ou mieux la scale up de l’année, de pitcher leur activité sur le marché, de proposer un produit innovant, de grandir au plus vite, de trouver des investisseurs. C’est une vision très agressive de l’entreprenariat. Mais quand leur parle-t-on de régler les problèmes de notre société, de partager une partie du profit, de redistribuer ce qu’une entreprise a pu accumuler ? On aimerait, avec d’autres intervenant.es à Bruxelles ou ailleurs, les informer à propos des alternatives engagées possibles dans l’entrepreneuriat, les sensibiliser aux entreprises liées à l’économie sociale par exemple. »
« Le code des entreprises a évolué récemment. Il donne plus de flexibilité aux ASBL qui peuvent désormais intégrer une activité commerciale. Nous faisons du profit. C’est même central dans notre mécanisme. La question devrait plutôt être : que faisons-nous de nos bénéfices ? » - Benoît Rolin, Co-fondateur & CEO